Élections présidentielles en Centrafrique :

Au premier tour on élimine... (Suite)

 

     Dans le premier volet des réflexions sur les présidentielles du 27 décembre 2020 en Centrafrique, les défauts des principaux candidats ont été passés en revue. Plusieurs compatriotes ont apprécié la démarche. D'autres exigent d'aller plus loin, en prenant partie.

Théoriquement, il serait habille de se réfugier derrière le sacro-saint principe de l'intimité et du secret des votes – principe reconnu et porté par la constitution – pour ne pas s'engager outre mesure. C'est une posture commode qui sied aux hommes politiques sans principes. L'autre optique est de montrer ses préférences, sans pour autant donner quelque consigne de vote. C'est le principe de responsabilité.

 

 

1 – Un nouveau contexte insurrectionnel.

Trois événements politiques majeurs sont  venus ces derniers jours obscurcir le ciel politique.

Ces trois événements sont :

-        la dénonciation unilatérale de l'accord politique de paix et de réconciliation nationale de Khartoum par les groupes terroristes, regroupés au sein de la coalition des patriotes pour le changement (CPC). Ils étaient jusqu'alors les seuls bénéficiaires de cet accord ;

-        la prise de position du général François Bozizé, ancien chef de l’État, qui a revêtu son uniforme de putschiste compulsif en prenant la tête d'une insurrection militaire, associé aux terroristes ci-dessus, pour « user de tous les moyens de coercition pour contraindre le pouvoir à une large concertation » avant les élections ;

-        la précipitation à Bossangoa, fief du général Bozizé, du président de l'URCA, Anicet Georges Dologuélé, en marque d'allégeance. C'est une faute politique majeure qui va lui aliéner l'électorat républicain et démocrate.

Dans un tel contexte d'insécurité, les partis membres de la coalition de l'opposition démocratique (COD-2020) suspendent leur campagne électorale et demandent le report des scrutins groupés du dimanche 27 décembre prochain. Ils s’inscrivent dans une stratégie fluctuante, aux contours ondoyants. Depuis, l'insurrection militaire est un échec et les voici, politiciens sans principes, pris à leur propre jeu.

Dès lors, tel Moïse sauvé des eaux, le président sortant Faustin Archange Touadéra plastronne et, en un footing entouré de sa garde prétorienne, enjoint aux Centrafricains d'aller voter, entonnant pour la circonstance une homélie du Pape Jean-Paul II : « N'ayez pas peur » !

Il est difficile en effet de stopper un processus électoral lancé à une semaine des échéances. Ce serait un retour à l’état sauvage.

 

2 – Les six engagements clés.

Si le général Bozizé est la victime d'une ambition dévorante pour le pouvoir, au point de faire le sacrifice de ses enfants, on se demande ce qui pousse certaines personnalités éminentes à le suivre dans cette malheureuse aventure. A y regarder de près, l'intelligence ne met pas à l'abri des faux calculs.

Afin de laisser quelque chance au hasard, seul maître des probabilités, le représentant de l'opposition devra, s'il veut avoir quelque chance de contraindre le président sortant à un second tour, prendre publiquement les 6 engagements suivants :

-        se défaire de la stratégie du « désarmement concerté », les groupes terroristes ayant vidé l'accord de Khartoum de sa substance ;

-        écarter du gouvernement de la république les tenants des divisions et du tribalisme, ainsi que les partisans de la partition du pays regroupés au sein du CPC ;

-        traduire en justice tous les corrompus, en col blanc ou bleu, ainsi que tous les auteurs des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité et les droits humains ;

-        former un gouvernement de salut public fondé sur un principe simple : le ministre est un homme ou une femme politique, en charge d'une administration et d'un budget, responsable devant le parlement – foin de la pléthore de ministres conseillers à la présidence ou à la primature ;

-        définir une orientation stratégique claire en matière de sécurité intérieure et de défense nationale, visant à rétablir, à très court terme (3 mois), la libre circulation des personnes et des biens sur toute l'étendue du territoire national ;

-        élaborer une nouvelle politique économique ayant pour objectif de sortir la majorité des Centrafricains de la très grande pauvreté, en mettant en place une stratégie de confiscation des rentes minières au profit du peuple.

C'est la seule condition pour obtenir l'honneur d'éliminer les autres concurrents et prétendre aux  suffrages de nos concitoyens.

 

Paris, le 23 décembre 2020

 

Prosper INDO

Économiste,

Consultant international.